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Note : Ce contenu a été créé avant que Fabernovel ne fasse partie du groupe EY, le 5 juillet 2022.
Pour FABERNOVEL, notre Data Architecture Director Julien Breitfeld revient sur les grandes thématiques de l’année, qui ont alimenté nos discussions Slack et engendré nos plus beaux débats…
[DISCLAIMER
Les opinions présentées dans cet article sont celles de notre Data Architecture Director, et elles promettent de générer de nombreuses discussions en interne. Parce que chez FABERNOVEL, c’est aussi le débat qui nous anime…
Découvrez le point de vue de Julien, et faites-nous part du vôtre !]
Figure 1 : Peter Cushing, décédé en 1994, dans StarWars Rogue One, sorti en 2016
Jusqu’ici, la réalité environnementale imaginée était le fait des arts ; la production et la publication de l’imagination humaine exécutée via les supports écrits, puis images.
La distorsion de la réalité s’est rapidement été appelée « effets spéciaux », d’abord analogiques puis numériques. Le jeu vidéo a pleinement profité des capacités de calcul de la machine pour produire en temps réel des images. Cette illusion de la réalité a franchi un nouveau palier avec l’apparition des effets spéciaux digitaux (CGI) dans les films, d’abordau début limités à l’environnement des acteurs sur fond vert. Il s’avère maintenant qu’il est aussi autant difficile de distinguer le vrai du faux que d’imaginer les plans qui sont « truqués ».
Pour voir des personnages 3D dans un film, il fallait regarder Final Fantasy, ou chercher des monstres tels Golum, ou les personnages peuplant Avatar. L’image a ensuite permis d’intégrer des visages dans du virtuel, comme dans dans Gravity ou ExMachina.
Mais la sortie du dernier Star Wars, Rogue One, a matérialisé un autre film de science-fiction, Le Congrès. Dans Rogue One, Tarkin est bien vivant et toujours interprété par Peter Cushing, alors que l’acteur est décédé en 1994. Il n’est pas question de casques Vive, Oculus ou Hololens, mais il est question ici d’une réalité tout aussi virtuelle.
Et elle ne concerne pas qu’un monde de cinéma et de jeux vidéo. On trouve cette altération de la réalité dans des endroits totalement improbables ; ainsi, Ikea réalise ses catalogues papier avec des meubles et accessoires en images 3D. De même, le photoshopage des mannequins n’est pas un fait nouveau, mais il s’agit bien d’une autre réalité. Alternative ?
De même, alors que la campagne américaine en 2016 a mis en exergue les fake news, on pourra s’interroger sur la production du réel à venir avec des outils comme ceux d’Adobe ou de Google, qui permettent de reproduire des intonations de voix d’une personne, et donc de lui faire tenir des propos étrangers.
Si cette altération du réel provient principalement de l’industrie de l’entertainment et de la publicité, laquelle doit embellir pour vendre le rêve, quid de l’immixtion d’autres catégories de speakers dans le jeu ?
Figure 2: La 2ème mort de Nikolai Yezhov (après sa disgrâce auprès de Staline)
La réalité virtuelle, c’est aussi et surtout une nouvelle page de l’histoire de l’humanité, la façon de concevoir le Monde. L’émergence des plateformes a provoqué la même chose que l’invention de l’espace public : une appréhension du Monde. On ne peut imaginer que ce qu’on peut concevoir. Le fait d’appréhender du « nouveau » (horizons, peuples, inventions) provoque des réactions, parfois brutales, face à l’inconnu, ou tout simplement la (re)mise en cause de l’existant.
Si le monde s’est toujours organisé en bulles de filtres (eg, les CSP), son aplatissement a provoqué l’apparition de couches ; couches qui se superposent pour le meilleur, et pour le pire.
Figure 3: Collision entre le monde réel et la surcouche de réalité virtuelle
Un monde décrit par Cline dans “Ready Player One” est à portée de mains. Il s’agit de plateformes techniques, infrastructures, code, qui définissent l’environnement dans lequel nous allons nous mouvoir et provoquent de fait un changement de paradigme (désolé) : l’utilisateur/joueur n’est plus interprété, il devient acteur. Concernant les contenus, le livre laissait un pouvoir à l’imagination, le film était l’interprétation d’une histoire par un seul (le réalisateur) ; la réalité virtuelle va déporter l’humain dans ses propres fantasmes : le monde dont vous êtes le héros.
Ainsi, on peut choisir de vivre dans un nouvel « état », choisi, comme le fut en son temps internet. La différence avec internet, c’est que la complexité engendre son appropriation.
Par exemple, lorsqu’on voit les politiques contraignantes des plateformes comme facebook ou Apple concernant les contenus (nudité ou contenus « inappropriés » interdits), on peut se demander ce que seront les CGU d’Oculus ou du futur device AR/VR d’Apple.
Néanmoins, AR/VR est un rêve pour tout publicitaire qui se respecte ; déporter la metadata dans le champ de vision de l’utilisateur, adapter les messages et les contextualiser en fonction dupar rapport au consommateur et à l’environnement est le but ultime des logiques de CRM.
Figure 4: Représentation artistique d'un supermarché de demain avec un dispositif d'AR
Dans ce nouveau monde, contrôlé par les GAFA, mais pas que (puisque les Chinois sont eux aussi largement impliqués dans son développement), une distinction d’importance. La réalité augmentée (qui inclut également la « mixed reality », comme dans l’illustration ci-dessus) se démarque de la réalité virtuelle, et c’est là que se joue également l’appropriation par la complexité.
Ainsi, Google qui met à disposition Google Earth sur le HTC Vive, est propriétaire d’une représentation de la planète, qu’il pourra aisément commercialiser pour tout une sorte de services (intégrer des jeux, de la publicité, des usages existants IRL), mais au regard de licences d’utilisation dont il sera le seul maître.
Figure 5: Vue de la ville de Tokyo, entièrement mappée en 3D, dans Google Earth sur HTC Vive
On peut penser que l’adoption de la réalité virtuelle pourra prendre quelques décennies, mais les investissements consentis par toutes les industries qui cherchent à capter le marché sont colossaux, et l’ingéniosité est ici de mise. Par exemple, Google qui commercialise un kit d’adaptation à des smartphones existants pour moins de $100.
Enfin, il est possible de voir de nouveaux entrants sur ce segment, hors les équipementiers ou les plateformes en place, qui s’essaieront eux aussi à capter un marché forcément exclusif (Voir par exemple https://spatialos.improbable.io/)Figure 6 : Spatialos
Dernier point, essentiel ; quid de la propriété de cette réalité ? Des lois qui la régissent ? Le(s) layer(s) supplémentaire(s) seront-ils considérés comme des espaces publics ? Privés ? Quid des metadata qui ne manqueront pas d’être intégrées dans ce layer ? Et quid de la légalité de l’information qui y sera présentée ? Quid du meurtre en VR ? De la torture ? De l’intégration de comportements déviants ou hors la loi ?.
Une dernière chose : alors qu’on assiste à une libéralisation de l’individu, qui transforme chacun en un roi dans son royaume, quid de la façon de faire société lorsque chacun verra midi à sa porte ? Le fait pour chacun de vivre sa propre réalité, non plus subjective mais objectifiée, aura-t-il tendance à supprimer le vivre ensemble ? Questions ouvertes. Vous avez 4h…